

« Le Conseil des États a corrigé le projet pour revenir à un dispositif ciblé »
Arnaud Midez
L’attractivité ne se décrète pas, elle se construit
D'un coup d'oeil
- Le Parlement examine une loi soumettant certains investissements étrangers à une autorisation étatique
- Les investissements directs étrangers restent indispensables, car le capital disponible en Suisse ne couvrant pas l’ensemble des besoins en financement
- Les risques sérieux ne viennent pas des rachats déclarés, mais d’activités illégales. Notre pays dispose d’instruments pour y répondre
Dans un contexte international instable, la Suisse doit éviter de fragiliser ce qui fait sa force: règles stables, ouverture maîtrisée et sécurité juridique. L’idée d’introduire un contrôle étatique des investissements étrangers revient régulièrement dans le débat, portée par l’argument de la sécurité. Mais ce n’est pas là que se situent les véritables enjeux.
Le capital disponible en Suisse ne couvrant pas l’ensemble des besoins en financement, les investissements directs étrangers restent indispensables. Notre économie exporte ainsi beaucoup de capitaux tout en dépendant, en parallèle, d’apports étrangers; cet équilibre contribue depuis longtemps à sa compétitivité malgré la taille du marché. Alourdir ce cadre par de nouvelles contraintes ne le renforcerait pas, cela l’affaiblirait.
Les exemples étrangers confirment ce point. Même les États-Unis, avec leur vaste marché intérieur, ont récemment simplifié leurs procédures d'examen des investissements étrangers (Commitee on Foreign Investment, CFIUS) afin d'attirer des fonds supplémentaires. Le Royaume-Uni souhaite également assouplir sa procédure de vérification. Et même dans les pays disposant d’un mécanisme d’examen, les interdictions d’acquisition restent marginales alors que les coûts administratifs sont élevés pour les entreprises comme pour les autorités.
Les risques sérieux ne viennent pas des rachats déclarés, mais d’activités illégales: cyberattaques, espionnage économique, vol de propriété intellectuelle. Pour y répondre, notre pays dispose d’instruments précis: contrôle des fusions, obligations de déclarer en droit boursier, infrastructures critiques majoritairement en mains publiques. Aucune acquisition récente n’a mis en danger l’ordre public, comme l’a rappelé le Conseil fédéral.
Le projet adopté par le Conseil national va trop loin car il étendrait la supervision à de nombreuses transactions, bien au-delà des cas sensibles. Le Conseil des États a corrigé cette dérive en revenant à un dispositif ciblé, conforme à l’approche du Conseil fédéral. Selon le SECO, la version du National multiplierait par dix les demandes d’examen, augmentant coûts et délais dans une conjoncture déjà fragile. La Suisse est pourtant, déjà aujourd’hui, plus restrictive que la moyenne de l’OCDE et plus stricte que ses voisins dotés d’un mécanisme formel.
La Confédération ne peut demander plus d’ouverture à ses partenaires tout en érigeant chez elle des obstacles excessifs qui nuiraient à sa crédibilité.
Dans un environnement où chaque imprécision coûte cher, brouiller les règles du jeu serait contre-productif. Un dispositif trop large pénaliserait l’ensemble du tissu économique, réduirait notre attractivité et compromettrait la position de notre pays à l’international. La stabilité et la clarté restent nos meilleurs atouts.
Le présent projet a été publié dans l'Agefi le 10 novembre 2025.
Articles pertinents
S'abonner à la newsletter
Inscrivez-vous ici à notre newsletter. En vous inscrivant, vous recevrez dès la semaine prochaine toutes les informations actuelles sur la politique économique ainsi que les activités de notre association.
