Basile Dacorogna

« Des solutions existent: le temps des discours est passé, place à l’action »

Basile Dacorogna

La Suisse, un pays riche… en formalités inutiles

D'un coup d'oeil

  • Longtemps perçue comme un modèle d’efficacité et de pragmatisme, la Suisse s’enfonce pourtant de dans une bureaucratie coûteuse, qui menace sa compétitivité
  • Lors d’une conférence de presse conjointe avec d’autres organisations, economiesuisse a lancé un cri d’alarme
  • La solution passe par des actions ciblées: numériser et standardiser les interfaces avec l’administration, éviter des réglementations inutiles et simplifier les règles environnementales et énergétiques 

Longtemps perçue comme un modèle d’efficacité et de pragmatisme, la Suisse est souvent citée en exemple par ses voisins européens. Pourtant, derrière cette image idyllique se cache une réalité moins glorieuse : le pays s’enfonce de plus en plus dans une bureaucratie coûteuse et paralysante, qui menace sa compétitivité. Une étude récente de l’ifo Institut et de la BSS Volkswirtschaftliche Beratung AG le confirme: plus de 30 milliards de francs s’évaporent chaque année en raison de procédures administratives inefficaces. Un gaspillage qui rappelle étrangement les critiques adressées à Bruxelles, alors que la Suisse se voulait justement l’antidote à la lourdeur européenne. 

La Suisse n’est plus ce «modèle svelte» qu’elle prétendait incarner. Si elle avait réformé sa bureaucratie il y a dix ans, son PIB par habitant serait aujourd’hui 5% plus élevé. Un constat accablant, alors que les entreprises suisses, déjà sous pression face à la pénurie de main-d’œuvre et à la concurrence internationale, voient leur temps et leurs ressources engloutis par des formalités inutiles. 

L’étude révèle un autre chiffre frappant: 55 000 emplois à plein temps pourraient être libérés si les tâches administratives étaient réduites. Dans un pays où chaque compétence compte, chaque heure perdue à remplir des formulaires est une heure de moins pour innover, produire ou se développer. 

Lundi lors d’une conférence de presse conjointe avec l’Union suisse des arts et métiers (usam), l’Union patronale suisse et l’Union suisse des paysans, economiesuisse a lancé un cri d’alarme. Christoph Mäder, président d’economiesuisse, a été sans détour: «Nous exigeons une digitalisation totale des échanges entre l’économie et l’administration, un moratoire sur les nouvelles réglementations en matière de durabilité, et une refonte des règles environnementales et énergétiques.» 

Contrairement à une idée largement répandue, la Suisse n’est plus en tête de peloton en Europe en matière d’efficacité administrative. Des pays comme la Suède, le Danemark ou l’Estonie ont su développer des processus plus fluides et mieux digitalisés, tout en maintenant un cadre réglementaire solide. Leur succès démontre qu’une administration moderne peut allier rigueur et simplicité, sans sacrifier ni la qualité des services publics ni la compétitivité des entreprises. La Suisse gagnerait à s’en inspirer — et à passer rapidement de la parole aux actes. 

Trois priorités pour alléger les charges administratives. Pour Christoph Mäder, la solution passe par des actions ciblées: 

  1. Numériser et standardiser toutes les interfaces entre l’économie et l’administration, avec une authentification unique («single sign-on») et des portails conviviaux.
  2. Éviter les réglementations inutiles, comme la reprise automatique de directives européennes (CSDDD, taxonomie UE, EUDR), qui alourdissent inutilement les entreprises.
  3. Simplifier les règles environnementales et énergétiques, en supprimant par exemple la taxe sur les composés organiques volatils (COV) ou en corrigeant l’ordonnance sur le CO₂ pour offrir plus de sécurité juridique. 

On le voit les solutions existent: simplifier les procédures, miser sur la digitalisation, et faire confiance aux entreprises plutôt que de les étouffer sous les réglementations. La balle est dans le camp du monde politique. Le temps des discours est passé, place à l’action. 

Le présent article a paru dans l'Agefi le 24 novembre 2025.

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