Les activités de financement resteront à l’étranger

​Le Conseil fédéral a décidé de renoncer pour l’instant à une réforme de l’impôt anticipé. Ce signal est défavorable pour la place économique suisse. Bien que la Suisse soit l’une des principales places financières du monde, des groupes suisses devront continuer de se financer à l’étranger. L’adoption rapide de mesures correctives est désormais urgente.

Le renforcement du marché suisse des capitaux figure depuis longtemps à l’agenda des milieux économiques. Le Conseil fédéral s’était saisi de cette question et avait proposé une réforme de l’impôt anticipé. Celle-ci aurait accru l’attrait de la Suisse pour les activités de financement de sociétés à vocation internationale et amélioré, dans le même temps, la fonction de garantie de l’impôt anticipé. Le Conseil fédéral a maintenant décidé de renoncer momentanément à cette réforme, ce qui est regrettable.

L’impôt anticipé prélevé sur les obligations suisses représente un problème majeur du marché suisse des capitaux. Les entreprises peuvent lever des capitaux à des conditions peu concurrentielles. En conséquence, des sociétés suisses procèdent à ces opérations de financement à l’étranger. Ce problème a été identifié il y a longtemps et a entraîné une adaptation de l’ordonnance concernée en 2011. Cependant, les changements étaient insuffisants, de sorte que des groupes suisses mènent toujours leurs activités de financement intragroupe (« cash-pooling ») à l’étranger. Pour que des capitaux étrangers soient levés en Suisse (ou des obligations émises), il faudrait également une réforme en profondeur qui exonère au moins les investisseurs étrangers de l’impôt anticipé. Cet impôt n’a aucun sens pour eux, qui ne sont pas assujettis à l’impôt dans notre pays. C’est la raison pour laquelle les émissions d’obligations importantes, pour lesquelles la présence d’investisseurs étrangers est nécessaire, sont rarement réalisées en Suisse.

Les entreprises font les frais de cette situation, dans la mesure où le recours à une place financière étrangère coûte plus cher. Cela prive également la place financière suisse d’un segment du marché (les émissions d’obligations). Les emplois et les recettes fiscales qui y sont liés se trouvent à l’étranger et ils le resteront jusqu’à nouvel avis, suite au refus de réformer l’impôt anticipé.

La place économique suisse n’a pas grand-chose à offrir dans le domaine du financement. Ce n’est pas avantageux compte tenu des développements fiscaux internationaux (processus BEPS de l’OCDE), qui pourraient entraîner une redistribution prochaine des cartes. Les fonctions centrales des groupes auront tendance à se concentrer et à se déplacer vers certaines places économiques.

Après la décision du Conseil fédéral, il faut se demander à nouveau et urgemment s’il faut adapter rapidement l’ordonnance relative à l’impôt anticipé, afin que des groupes suisses puissent mener des activités de financement intragroupes en Suisse (biffer l’art. 14a, al. 3 OIA).